Le fils de Taounate M’FADEL EL HALAISSI analyse « Le coût économique des choix de confinement »

Par M’FADEL EL HALAISSI°(Publié dans le Journal “L’Economiste”): “Taounate.Net” /

Depuis l’avènement de la crise sanitaire du «Covid-19», officiellement déclaré et reconnu au début de l’année 2020, toute une abondante littérature a été produite sur les estimations des impacts économiques négatifs sur les économies de chaque pays individuellement et à l’échelle mondiale.

Les calculs ont fait ressortir que le coût financier des politiques de confinement est incontestablement exorbitant. D’aucuns évaluent ces coûts financiers directs en termes de nombre de point de PIB de chaque économie, variant de quelques points à 10% du PIB pour certaines économies ! C’est dire si la facture des politiques de confinement est trop salée, voire indigeste, si l’on y ajoute les coûts indirects, les coûts économiques globaux, les coûts sociaux, psychologiques, bien-être, décès directs et indirects, etc.

L’addition de ces coûts (quantitatifs et qualitatifs), actuels et à venir, donnera le vertige, et restera dans les sillons de la démesure philanthropique ! Et au bout de tous ces sacrifices, un très maigre résultat. On ne compte plus quand il s’agit de la santé Publique. La vie n’a pas de prix.

Certes, on ne peut pas quantifier financièrement la valeur de la vie d’un citoyen pour déduire le coût acceptable économiquement pour une économie donnée, par une société donnée. Mais on est en droit de dire si la politique de confinement des populations est la seule alternative de lutte contre la pandémie, «quoi que ça coûte pour la nation toute entière»… N’y a-t-il pas d’autres choix plus rationnels ? Moins coûteux pour la société ? Et dont les objectifs escomptés ont une forte probabilité d’être atteints ?

Autant dire qu’à la genèse de la pandémie (janvier-février 2020), les décideurs publics étaient pris au dépourvu et ont immédiatement choisit de protéger les populations en les confinant totalement. Mais actuellement, après la courte expérience (à l’échelle d’une pandémie) d’une année, on dispose d’un capital de connaissance d’éléments tangibles dans la lutte contre le virus et de certains succès dans les batailles de cette longue et coûteuse guerre anti-«Covid-19».

Les décideurs doivent se servir des conclusions de cette période d’observation pour conforter leurs convictions et avoir le courage politique nécessaire de poser la question d’une alternance possible à une décision mimétique de confinement.

>> Constats et observations sur 1 an de la gestion de la pandémie

Toute réflexion sur une politique d’alternance au choix du confinement doit mettre en relief les conclusions suivantes.

Toute politique de confinement doit être appréhendée sous l’angle d’une transition vers une solution probable ou certaine, avec des mesures d’accompagnement visant l’élimination du virus ou, du moins, l’atténuation des facteurs de propagation.

Force est de constater que les sacrifices du confinement total de la quasi-totalité du monde, au printemps dernier, ont très peu servi à atténuer la propagation du virus durant l’été du déconfinement.

Les mesures de confinement partiel de l’automne n’ont fait qu’un report d’échéances des risques de contamination massive des populations, exacerbée par l’arrivée de nouvelles variantes de ce virus durant l’hiver suivant !

Le spectre d’un confinement plus muselé est en train de se mettre en place avec la crainte d’un «rejet légitime» des populations à s’y soumettre, entrainant une spirale de désobéissance civile. Le citoyen exige des résultats concrets et tangibles en adéquation avec les coûts économiques et les sacrifices de sa liberté et de son bien-être qu’on lui demande.

La politique de confinement ne doit pas se limiter à différer la crise sanitaire d’une période donnée à une autre, sans déclinaison d’un plan d’action en parallèle, visant à éradiquer le mal, et ce, dans un horizon précis.

La question de l’alternance à une politique de confinement est à envisager à l’aune des campagnes de vaccination lancées par plusieurs pays dans le monde. Il est indéniable que le vaccin apporte un grand soulagement et une vraie délivrance aux populations anxieuses et souffrantes. Cependant, face à un tel «difficile arbitrage», très lourd de conséquences entre le choix d’un confinement à d’autres alternatives, le décideur politique reste confronté à la question fondamentale : comment assurer l’immunité collective en vaccinant le maximum possible de la population en un minimum de temps et avec le type de vaccin le plus fiable et disponible en quantités suffisantes ?

L’équation n’est certes pas facile, surtout que plusieurs variables sont totalement exogènes, notamment celles liées aux mastodontes des laboratoires pharmaceutiques qui mettent même les États les plus puissants de ce monde à leur merci.

Néanmoins, deux constats doivent être mis en relief à ce sujet :

– La majorité des scientifiques s’accordent à dire que le vaccin a été recherché et trouvé en un temps record, ce qui est en soi un acquis exceptionnel pour l’humanité. En outre, celui-ci existe chez de nombreux laboratoires internationaux (Pfizer, Astra Zeneca, Sinopharm, Spoutnik…).

– Le bémol est que la production n’arrive pas à suivre pour satisfaire la demande mondiale, créant ainsi une rareté économique accentuée par des enjeux politiques aux relents chauvinistes.

Face à cette multiplicité de l’offre de typologies de vaccin, il y a un vide total dans les étalages de médicaments. Il est curieux que les efforts de la recherche et développement soient concentrés exclusivement sur la formule du vaccin après identification du virus, et qu’à l’heure actuelle, nous n’avons pas encore développé le médicament qui le soigne !

La plus importante des convictions à mettre en exergue dans l’arbitrage des choix alternatifs au confinement est l’universalité du virus. Celui-ci n’a pas de frontières, ni de préférence raciales ethniques ou communautaires. Ainsi, toute décision afférente à cette lutte contre la pandémie doit être appréhendée à l’échelle humaine, donc universelle.

Le virus «Covid-19», par sa force de propagation, a mis à nu certains rapports artificiels et inégalitaires entre les hommes et a contribué à rappeler à ces derniers qu’ils sont égaux face à ce mal avec un destin commun et une trajectoire unique de l’humanité sur cette planète.

>>Arbitrage des coûts économiques du confinement entre passivité et choix rationnels audacieux

La politique de confinement suivie par la majorité des pays dans le monde a coûté, et coûte encore, trop cher aussi bien sur le plan purement financier que sur les plans des impacts socio-économiques et du bien-être social. En se limitant uniquement aux aspects financiers, nous pouvons avancer que dans la majorité des cas, les États ont déployé d’énormes efforts pour atténuer les conséquences et très peu pour traiter les causes !

Imaginons qu’une partie de ce coût économique supporté par les économies mondiales ait été affectée à l’extension des capacités hospitalières, à la formation et au recrutement du personnel médical, à l’augmentation des capacités de production des vaccins et soins en médicaments, à la recherche et développement médical… La situation serait probablement très différente de celle que vit le monde actuellement !

Ce qui est paradoxal, c’est que le niveau des dépenses de la santé dans les pays dits développés est très élevé tout en affichant des carences et insuffisances flagrantes au registre de la lutte contre cette pandémie. Il y a certainement une irrationalité dans l’allocation et l’affectation des ressources aux dépenses de la santé. Ainsi, selon le rapport de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) paru en septembre 2017, le niveau des dépenses courantes de la santé varie de 4% à 12% du PIB au sein des pays membres de l’Organisation (hors États-Unis). La France arrive en tête du peloton avec la Suisse pour environ 12% du PIB tandis que les États-Unis consacrent environ 17% de leurs richesses pour la couverture des dépenses de la santé.

En dépit de ce niveau très élevé des dépenses, auxquelles nous ajoutons les coûts économiques engendrés par les décisions de confinement, les résultats semblent trop modestes à l’heure actuelle sur le tableau de la lutte contre la pandémie du «Covid-19». Car la quasi-totalité de ces sacrifices financiers, sociaux, de restrictions des libertés et de dégradation de la qualité du bien-être, servaient à traiter les conséquences de la pandémie et non ses causes. La rationalité économique impose l’arbitrage dans le choix de l’affectation des moyens dont dispose la pouvoir public pour le meilleur bien-être possible de ses citoyens.

Face à cette période de pandémie, il y a nécessairement un besoin crucial de l’intervention de l’État dans le secteur des laboratoires pharmaceutiques et de la recherche et développement en médecine. On ne comprend pas pourquoi certaines activités économiques telles les transports, l’énergie ou l’eau (à titre d’exemples) continuent à bénéficier du label de Service Public alors que les laboratoires pharmaceutiques sont souvent du domaine privé…

Au regard du coût économique exorbitant de cette pandémie, la rationalité économique justifie la nationalisation et l’étatisation de la recherche et de la production pharmaceutique, voire leur internationalisation !

°Directeur Général Délégué BANK OF AFRICA- D’Origine de Taounate (Maroc).

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